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En famille

Quel rôle les chatouilles jouent-elles dans le développement de l’enfant ?

Les chatouilles servent‑elles seulement à rigoler ? Pas si simple… Daniel Marcelli, pédopsychiatre et chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent au CHU de Poitiers, nous éclaire sur ce qui se cache derrière l'apparence anodine des chatouilles.

 

Quel rôle les chatouilles jouent-elles dans le développement de l'enfant ?

Les chatouilles jouent des rôles aussi multiples qu'importants. Le plus évident est sur le plan émotionnel et affectif. Le jeu de chatouilles réside dans le partage : parent et enfant s'amusent l'un avec l'autre dans un climat de tendresse favorable à l'épanouissement. Les chatouilles sont de formidables instants d'intimité : un regard échangé, une main serrée, un sourire partagé…

Mais le rôle des chatouilles se retrouve aussi sur un plan physique : c'est une manière agréable pour l'enfant de prendre conscience de son corps. Et cela est d'autant plus vrai si les parents nomment les parties du corps qu'ils chatouillent. C'est notamment le cas dans les jeux tels "le petit riquiqui" ou encore "la petite bête qui monte" : sur le pied, la jambe, le ventre, etc.

Y a-t-il des bénéfices sur le plan psychologique ?

Cela peut paraître surprenant, mais les chatouilles participent à l'ouverture relationnelle. En effet, dès les premiers mois de la vie, l'enfant découvre le plaisir d'être touché, du frôlement des doigts sur sa peau. Quand l'enfant grandit, la maman y ajoute le paramètre de la surprise… Habitué à la manière de faire de sa mère, le petit est surpris quand celle-ci la modifie. La chatouille n'arrive pas au même moment, au même endroit ou au même rythme ?

L'enfant est surpris et, s'il est en confiance, il rit ! C'est le décalage entre ce qu'il attend et ce qui se passe réellement qui crée le jeu. L'enfant apprend ainsi à accepter, et même à apprécier l'incertitude. On peut donc penser qu'un enfant que l'on chatouille a plus de chances de devenir un adulte enclin à accepter ce qu'il ne maîtrise pas… et donc à être plus facilement ouvert.

Quelles limites faut-il respecter ?

Ce qui est important, c'est de savoir qui chatouille, où et quand. Les frôlements, les jeux avec la peau sont des gestes intimes, que l'enfant n'accepte que de la part de personnes de confiance. Même remarque pour le lieu : l'espace clos de la chambre est plus adapté que la kermesse de l'école !

Enfin, on ne fait pas de chatouilles n'importe quand : il faut que l'enfant soit disponible, qu'il n'ait pas envie de manger, de dormir… ou simplement de faire autre chose ! Il faut également veiller à la sensibilité de chacun : tel petit garçon ne supportera pas qu'on lui chatouille les aisselles, telle petite fille refusera qu'on effleure ses pieds. Chacun a des zones où les chatouilles basculent du délice à la torture. Enfin, n'oublions pas qu'en toute chose l'excès est dommageable : dès que l'enfant s'excite, s'épuise, et encore plus s'il pleure ou se met en colère, on arrête ! Il faut être à l'écoute.

 

Le 11 mars 2010 Daniel Marcelli, propos recueillis par Marie Grenier. Illustration de Frédéric Sther.

Le refus des chatouilles : histoire… et légendes

Les chatouilles sont universelles : on chatouille partout, et depuis toujours, même si les formes varient d’un lieu et d’une époque à l’autre. En France, il n’y a guère qu’au XIXe siècle, où les rapports avec les enfants étaient sous l’emprise puritaine de l’hygiène, que l’on a tenté d’interdire les "mignardises"... Le refus du plaisir a aussi produit des croyances étonnantes : on a longtemps pensé que chatouiller la plante des pieds rendait les enfants bègues, ou encore idiots ! Mais, bien sûr, il s’agit là de pures légendes.

À propos de l'auteur…

La Surprise, chatouille de l'âme, Daniel Marcelli, Albin Michel, 21,50 euros.

 

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